7En novembre 2005 je me lançais dans un papier : Après les cols blancs, il y aura quoi !? Mais des « cols verts » ! Je viens de le retrouver circulant dans  des blogs sur le Développement Durable. J’y reviens sans en changer un mot car il reste un parfait exemple des gisements potentiels d‘emplois sur lesquels nous devons investir. Je me souviens qu’à l’époque j’avais essayé de convaincre certains des partenaires d’Eurotechnopolis Institut de se lancer dans une étude sur les caractéristiques de ces nouvelles populations actives. Pour moi l’étude avait l’avantage de rendre plus visibles des métiers pas toujours suffisamment connus. J’en attendais aussi la possibilité d’en faire un indicateur pour les priorités en matière de formation et d’embauche, un signal pour les investissements à privilégier, une invite pour les pouvoirs publics à accompagner et soutenir le mouvement des créations d’emplois selon les métiers les plus demandés. Le développement durable nous offre des opportunités qu’il nous faut mieux évaluer afin d’accompagner les grandes évolutions des filières professionnelles « vertes » qui orienteront les demandes des emplois dans la décennie.

cols vertsLes Hollandais vendent au monde entier leur savoir faire pour construire des barrages contre les inondations, les Italiens lancent les premières usines de traitement et de recyclage des équipements domestiques (réfrigérateurs), les Brésiliens font leur révolution énergétique avec les biocarburants, les Anglais passent des contrats pour développer leurs habitats écologiques et autonomes en énergie, les Danois proposent leurs éoliennes, les Israéliens, leurs méthodes de gestion économe de l’eau pour l’agriculture dans les déserts. Les Indiens deviennent les champions du recyclage des métaux. Les Belges ont déployé un réseau d’ambulances vertes afin de contrôler les pollutions domestiques. Les Français sont les champions du retraitement des eaux usées. Partout dans le monde les différentes applications du développement durable font leur apparition. Des centaines de milliers d’emplois et des spécialités précieuses sont créées tous les jours. Pourtant, ces milliers d’emplois, pas grand monde n’en parle. Tétanisé par la gestion des affaires courantes, le gouvernement français n’explore plus le futur de ses enfants. Secteur agricole, secteur industriel avec les cols bleus, secteur des services avec les cols blancs, et après ? Après ? Après ! Il y aura les « cols verts ». Qui s’intéresse à préparer nos écoles ?! Qui se mobilise pour prendre les parts de marché !? Qui identifie les nouveaux métiers ? Qui mesure les nouveaux emplois qui pourront être créés ?! Au début du 18ème siècle, plus de 80% de la population en état de travailler étaient de la classe paysanne. Au 19ème siècle : 50% de la population active restait dans le secteur agricole, plus de 30% dans l’industrie et le solde dans les secteurs marchands et des services. Dans les années 1950, cette proportion donne 25% pour le secteur agricole, 45% pour l’industrie et 30% pour les services. Début du 21ème siècle, moins de 3% de la population active travaillent dans l’agriculture, moins de 30% dans l’industrie et le reste (62%) dans les activités de services qui se sont éclatées entre temps pour différencier les activités marchandes et commerçantes, les services aux entreprises et à la personne et les « manipulateurs de symboles », les travailleurs du savoir. Cette analyse courante, à quelques décimales prés, devient obsolète sous la pression des métiers environnementaux. Dans les années 1980, nous constations la difficulté de différencier les populations actives dans ce qui était à l’époque le « secteur services » : longue liste à la Prévert qui mélangeait toutes sortes de métiers. L’informaticien était mélangé avec le coiffeur et l’activité d’un surveillant avec celle d’un ouvrier ou un employé de bureau selon qu’il travaillait dans une usine ou dans un bureau. Jamais l’analyse statistique n’a paru aussi délicate qu’à cette époque qui a vu une accélération des transformations des corps socioprofessionnels suivant en cela l’évolution de leur époque. Parmi ces évolutions, nous assistons depuis le début des années 1990 à l’émergence des métiers dédiés à la gestion de l’environnement, gestion de l’eau, récupération et traitement des déchets de l’industrie, de la société de consommation, gestion des forêts, suivi et valorisation des énergies renouvelables… Des milliers d’emplois ont été créés ces dernières années. D’autres ont évolué comme l’agriculture dont les savoirs sont utilisés en jardinerie et en aménagement de paysages mais aussi pour réduire les demandes d’eau, obtenir de l’ombre dans les immeubles. Une tendance lourde qui crée des emplois qui se consacrent à une meilleure gestion des ressources utilisées par nos sociétés. Ces actifs, encore mal recensés, représentent désormais, j’en suis convaincu, plus que les populations actives réunies de l’agriculture et des cols bleus. Allons-nous rester encore longtemps indifférents à identifier les caractéristiques de ces nouveaux métiers, de ces nouveaux emplois pour notre économie ?

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A propos de l'auteur

Denis

Denis Ettighoffer, fana de science-fiction, auteur de « L’entreprise virtuelle », le livre qui l’a fait connaître en 1992 est un des spécialistes français reconnus dans l’étude projective de l’impact des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication). Ses contributions à la réflexion sur les évolutions des sociétés, des modèles économiques et organisationnels sont nombreuses. Sa spécificité réside dans sa capacité à analyser le présent, pour en extraire les orientations économiques et sociétales stratégiques pour les décennies à venir. Son parcours atypique aura forgé chez lui une pensée singulière. Son dernier livre, « Netbrain, planète numérique, les batailles des Nations savantes » (Dunod) a reçu le prix du livre du Club de l’Economie Numérique en 2008. Denis Ettighoffer un temps Membre correspondant de l’Académie de l’Intelligence économique collabore désormais avec l’équipe d’IDEFFIE (Développement de l’expertise française et francophone à l’international et en Europe ) .

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  1. Des responsables de Pôle emploi ont reçu, à Paris, leurs homologues d’Arbetsförmedingen pour signer une convention de coopération sur les emplois verts. Vue de France, la Suède fait figure de bon élève: son taux de chômage a été ramené de 8,9% à 7,8%entre décembre 2009 et décembre2010, alors qu’il est resté quasiment inchangé en France, à 9,7%. Le pays scandinave bénéficie surtout d’une forte image écologique. «Nous ne cherchons pas à identifier spécifiquement les jobs verts, ils sont partout», s’est félicitée Elisabeth Arp, directrice des affaires internationales de l’organisme suédois. De quoi complexer les Français, qui peinent toujours à comptabiliser les promesses d’embauche dans les secteurs verts. La croissance verte peut être une aubaine, à condition que les services de l’emploi orientent les chômeurs vers les nouveaux secteurs et leur offrent les formations nécessaires. «Nous allons implanter 1 101 tourelles d’éoliennes d’ici à 2020, contre seulement une vingtaine actuellement. Cela représente 500 emplois pour la construction et la maintenance», a expliqué Martin Gaudet, un Québécois travaillant à Pitea, petite ville du nord de la Suède. «Des chômeurs seront sélectionnés, et on leur offrira une formation, détaille-t-il. A l’issue de celle-ci, 70%d’entre eux devraient avoir trouvé un emploi dans les trois mois.» Originalité de cette formation, un «module vert» qui a retenu l’attention des Français, avec, au programme, électricité verte, recyclage…

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